Galerie Georges-Philippe et Nathalie Vallois
[…] Est-ce dʼavoir été de ces Américains dʼascendance japonaise internés lors de la Seconde Guerre mondiale, est-ce dʼavoir eu, parmi les premiers paysages dʼune jeune conscience, les élévations des châteaux dʼeau et des miradors, et les allées des camps ? Toujours est-il que Ben Sakoguchi ne dispense pas seulement la joie nerveuse, corrosive de lʼobservateur épris de justesse et de justice; quʼil y a chez lui lʼémollient jamais mièvre dʼune douceur aimante – dʼune charité, dirions-nous, si le terme ne sentait pas par trop le bénitier et la bonne conscience qui sʼy humecte.
Car Ben Sakoguchi ne conçoit pas la bonne conscience ; il œuvre, comme Goya encore, dans ce terroir de crimes où éclosent, prospèrent, se répandent les monstres ; la voilà lʼimage qui peut élastiquement enclore les données, les procédés, la portée de cet art. Cʼest là, dans le tout-venant des minutes du si tortu « American Way of Life » que sʼaccuse la monstrueuse germination que consigne Ben Sakoguchi, vigie dont lʼœil est aussi éternellement ouvert que celui, extranaturel, du dollar américain. »
Extrait du texte de Damien Aubel dans le catalogue de lʼexposition de Ben Sakoguchi•Oranges•pancartes•cartes postales Co-édition Galerie GP & N Vallois & Les presses du réel, 2023