Ateliers Jean Nouvel
La tour du parc de Matarazzo
Une tour comme un arbre doit avoir des racines. Elle appartient à une géographie, à un territoire, à une topographie, à un sol, à une géologie. Elle est l’expression la plus lisible à distance du lieu d’édification.
La caractéristique majeure de la parcelle à construire est d’être limitrophe du parc de Matarazzo et de pouvoir aujourd’hui être une extension de ce parc. La tour devient une démultiplication de plans plantés, de terrasses arborées accueillant les mêmes essences que celles du parc. L’architecture, les matériaux des structures habitées appartiennent à la terre brésilienne, au Brésil, au pays du bois rouge.
Cette architecture parle du passé, d’aujourd’hui et du futur. Du passé puisque l’échelle et les techniques des constructions en bois ont traversé les siècles. D’aujourd’hui par son choix et sa volonté d’appartenance dans un rapport d’échelle et d’amitié aux constructions datées – presque anachroniques – de briques et de tuiles de l’hôpital. Enfin de demain pour annoncer que la fatalité d’habiter en hauteur n’est pas d’oublier les matériaux, les variations, les paysages domestiques qui ont accompagné avec douceur et complicité les vies de multiples générations mais, bien au contraire, d’inventer les jardins suspendus de São Paulo avec une végétation luxuriante et des vues insolentes. Il s’agit d’annoncer une reconquête par des immeubles de moyenne et de grande hauteur, d’un art de vivre capable progressivement de caractériser São Paulo. L’intimité sera protégée par des claustras, des arbres et des arbustes, par des rythmes et des ombres entremêlant géométries orthogonales de bois, sinuosités de branches et vibrations de feuilles.
Le parc de Matarazzo a envahi une tour. Qu’on se le dise. Sa tour sera regardée, enviée, fière et amicale et, à sa façon, elle dira : faites comme moi, goûtez les plaisirs de vivre. Et, autour de Matarazzo d’abord, puis un peu plus loin, les arbres commenceront à monter à l’assaut de la ville.
Jean Nouvel