Fondation Carmignac
Dieter Buchhart – Commissaire
SEA OF DESIRE : cette phrase, dont les mots se déploient sur la surface d’une grande peinture d’Ed Ruscha, attend les visiteurs en fin de parcours, dans la forêt. « Les mots ont une température » déclare l’artiste, « quand ils atteignent un certain degré et deviennent brûlants, ils m’attirent… ». La température des mots de SEA OF DESIRE est chaude, elle bouillonne de sens et d’ambiguïtés. D’un côté, cette phrase exprime notre Eros et notre désir de beauté ; de l’autre, elle contient notre irrésistible attirance pour le drame, voire la destruction.
Deux penchants contraires et indissociables qui sont à l’œuvre dans un magistral roman d’anticipation, écrit non loin de Porquerolles, à Sanary sur Mer, en 1931 : Le Meilleur des Mondes d’Aldous Huxley. Ce monument de la littérature pressentait les profonds changements de société dus aux nouvelles technologies, à la propagande et la manipulation des esprits. Trente ans plus tard, Huxley revisita son œuvre et vit que le monde accomplissait sa prophétie à haute vitesse : un monde séduisant qui contente les masses, mais qui se révèle rongé et manipulateur sous la surface. La société contemporaine ne fait que confirmer ces sombres prophéties.