De l’audace, encore de l’audace, toujours de l’audace. L’innovation dessinée par Christian Monjou
Pour cette quatrième Codex Conversation, nous avons invité Christian Monjou pour discuter de leadership, de crise, et de renaissance. Une interview qui souligne encore une fois ce lien entre notre paradigme, l’innovation et l’histoire de l’art.
Christian Monjou, la passion de l’éducation
Christian Monjou a enseigné une bonne partie de sa vie en tant que professeur au Lycée Henri IV et enseignant chercheur à Oxford . Grâce à une ancienne élève, il accède au monde entrepreneurial et y donne des conférences sur le leadership par le détour de l’art et de son histoire. Aujourd’hui, on retrouve ses récits filmés et postés sur internet au sein des clubs APM par exemple .
« Sortir du monde entrepreneurial, découvrir de grandes choses et revenir à l’entreprise le regard nourri »
Crise ou Renaissance ?
La crise permet l’innovation. L’innovation permet de sortir de l’habitude et d’aller vers la culture générale. L’exemple de la naissance de l’imprimerie au XVème siècle et celle du numérique au XXème siècle autorise la comparaison entre la Renaissance et notre époque contemporaine.
« Nous l’appelons une Renaissance, ils ont vécu cette dernière comme une crise, nous le vivons comme une crise, est-ce qu’un jour nous pourrons parler de Renaissance ? »
La Renaissance est la fin d’une grille de lecture qui ne fonctionne plus sur le monde. Nous avons la mesure de nous adapter à un changement à long terme, mais quand ce dernier est accéléré, l’adaptation est difficile et devient une crise.
Les exemples de Christian Monjou illustrent le nouveau paradigme que nous sommes en train de vivre.
Leadership et vision du monde
« La capacité du leadership, c’est de voir les changements que peu de gens perçoivent encore. »
Christian Monjou reprend certaines strates de l’Histoire pour expliquer notre crise à l’ère du numérique. Il évoque, entre autres, les châteaux de la Loire, qui pour beaucoup ne sont pas issus d’initiatives royales mais de commanditaires (marchands, banquiers). Il faut renoncer à des solutions toutes faites qui ne fonctionnent plus dans le contexte actuel.
Il évoque aussi l’importance de la perception dans le leadership. Il s’appuie sur l’ouvrage « Quattrocento » de Stephen Greenblatt pour expliquer que les changements sont aussi la conséquence d’une autre vision du monde. À la carte médiévale des trois continents (Afrique, Europe et Asie) représentant les trois fils de Noé et notre carte plus récente d’une Europe surdimensionnée, Christian Monjou ajoute la carte mentale du chef d’entreprise. Il met en garde contre cette possible vision du monde faussée par les préjugés.
Il propose la suppression des cloisons dans le management, où la combinaison des talents (et donc des perceptions) est l’art d’un leadership légitime.
L’innovation de rupture existe-t-elle réellement ?
L’innovation de rupture est un mythe car nous ne voyons pas le processus, mais seulement le résultat.
« L’inspiration ne précède pas le travail, c’est la rémunération du travail. »
L’exemple du cubisme et des influences entre Braque, Cézanne et Picasso, montre que nous avançons grâce aux progrès des autres, avec humilité et exigence envers soi-même. Il ne faut donc pas attendre d’avoir l’inspiration pour innover, mais l’inverse. Le leader n’a pas à être innovant, il doit rendre les autres innovants.
Un conseil : le regard
« Souvent, les solutions sont ailleurs. Il faut un œil sur la boîte et un autre à l’extérieur. Un strabisme divergent heureux. Ce qu’il se passe alors dehors n’est plus un obstacle mais une opportunité. »